Combinatoire énumérative
Combinatoire énumérative
 
    I Rappels de théorie des ensembles
    II Outils de base
  
  
I Rappels de théorie des ensembles
Le point de vue adopté est informel. On suppose connue une partie du vocabulaire de base sur les ensembles: appartenance, inclusion, produit cartésien, ensemble des parties.
    I-1 Applications
    I-2 Entiers naturels, récurrence
    I-3 Le cardinal d'un ensemble
    I-4 Ensembles finis
    I-5 Cardinaux infinis
    I-6 Relations binaires
  
  
I-1 Applications
Une 
application (ou 
fonction) 
f d'un ensemble 
E dans un ensemble 
F, notée 
, est la donnée, pour chaque élément 
x de 
E d'un élément 
f(
x) de 
F. L'ensemble 
E est appelé 
ensemble de départ et l'ensemble 
F est l'
ensemble d'arrivée. L'élément 
f(
x) est l'
image de 
x par 
f. On écrit aussi 
.
Un exemple trivial d'application est l'
application identique de 
E, notée 
 telle que 
. Si 
 et 
 sont deux applications, l'
application composée de 
f et 
g est
 
 Si 
A est une partie de 
E, on note 
f(
A) et on nomme 
image de 
A par 
f la partie
de 
F formée des images dans 
F des éléments de 
A. De même, si 
B est une partie de 
F, on note 
 et on nomme 
image réciproque de 
B par 
f la partie
de 
E formée des éléments de 
E dont l'image est dans 
B. Par extension, si 
y est un élément de 
F, on note 
 l'image réciproque du singleton 
. C'est donc l'ensemble des éléments de 
E dont l'image par 
f est 
y.
Cet ensemble peut être vide. On dit que l'application 
f est 
surjective, ou que c'est une 
surjection si elle n'est vide pour aucune valeur de 
y et qu'elle est 
injective, ou que c'est une 
injection s'il n'a plus d'un élément pour aucune valeur de 
y:
Définition
Une application 
 est
-  
injective si et seulement si 
 
-  
surjective si et seulement si 
 
-  
bijective si et seulement si  elle est à la fois injective et surjective.
 
En résumé, 
f est bijective si et seulement si  pour tout 
y de 
F, l'ensemble 
 a un élément et un seul, que l'on note
encore 
. On voit facilement que 
 est alors une bijection de 
F dans 
E et que l'on a 
 et 
. On dit que 
 est la bijection réciproque de 
f.
Il existe une autre notation courante pour les applications. La notation 
 désigne une 
famille d'éléments de 
X  indexée par l'ensemble 
I. Il s'agit simplement d'une application de 
I dans 
X, où 
xi est l'image de 
i par l'application.
  
  
I-2 Entiers naturels, récurrence
Nous admettrons l'existence d'un ensemble
dit ensemble des 
entiers naturels
muni d'une application injective 
 qui à un entier 
n fait correspondre son 
successeur noté 
n+1 qui
est telle que tout entier autre que 0 a un (unique) 
prédécesseur et qui vérifie le 
principe de récurrence:
Ce principe est en général utilisé de la façon suivante. Soit 
P un 
prédicat sur 
, c'est-à-dire  une propriété qui, pour chaque entier naturel, peut être vraie ou fausse. Si on a établi que 
P(0) est vrai et si pour 
n quelconque, en supposant 
P(
n) on a prouvé 
P(
n+1), alors 
P(
n) est vrai pour tout 
n. On applique pour cela l'énoncé ci-dessus à la partie 
A de 
 formée des 
n tels que 
P(
n) est vrai.
On peut déduire de ce principe la
Proposition [construction par récurrence]
Si 
 est une application et 
x un élément de 
X, il existe une application 
 et une seule telle que
g(0)=x et 
.
Une famille indexée par les entiers naturels s'appelle une 
suite.
L'application 
g ci-dessus est souvent notée sous forme de suite. On pose
xn=
g(
n) et on dit que la suite 
 est 
définie par récurrence par les relations 
x0=
x et 
.
L'ensemble 
 est alors muni de trois 
lois de composition c'est-à-dire  d'applications de 
 dans 
 appelées 
addition, 
multiplication et 
exponentiation et notées respectivement
, 
 ou 
a b et 
.
La construction se fait en utilisant le principe de récurrence et les relations
En d'autres termes, l'addition est définie par récurrence à partir de l'application 
S, la multiplication par récurrence à partir de l'addition et l'exponentiation par récurrence à partir de la multiplication.
Retenons en particulier que 
0
0=1.
Si 
m et 
n sont deux entiers naturels, on dit que 
m est 
inférieur ou égal à 
n et on note 
 s'il existe 
 tel que 
m+
p=
n. On montre que c'est une 
relation d'ordre c'est-à-dire  que l'on a
La relation d'ordre sur 
 est un 
bon ordre, c'est-à-dire  que l'on a:
Proposition
Toute partie non vide de 
 a un plus petit élément.
  
  Démonstration
   
Soit 
X une partie de 
 dont on suppose qu'elle n'a pas de plus petit élément. On pose
l'ensemble des minorants stricts de 
X. Comme 
0 est le plus petit élément de 
, il ne peut appartenir à 
X et on a 
. D'autre part, si 
 on a 
n<
m pour tout 
m dans 
X. Cela implique 
 mais 
n+1=
m impliquerait que 
n+1 est le plus petit élément de 
X. On a donc 
n+1<
m et 
. En application du principe de récurrence, on a 
, donc 
, ce qui termine la preuve.
Si 
m et 
n sont deux entiers naturels, on notera
En particulier, lorsque 
m>
n, 
 est l'ensemble vide 
.
  
  
I-3 Le cardinal d'un ensemble
L'existence d'une injection de 
E dans 
F peut être interprétée comme ``
E est plus petit que 
F''. Le résultat suivant permet de donner un sens précis à cette intuition.
Théorème [de Cantor-Bernstein]
Soient 
E et 
F deux ensembles. S'il existe une injection de 
E dans 
F et une injection de 
F dans 
E, alors il existe une bijection de 
E dans 
F.
  
  Démonstration
   
On définit par récurrence deux suites de parties de 
E par 
A0=
E, 
A'0=
g(
F), 
 et 
. On voit par récurrence que ces parties sont ``emboîtées'':
On pose
et on définit une application 
 par
 tel que 
}
f(x)&{ sinon}
{array}  .
)
Il reste à vérifier que 

 est une bijection.
De même que la couleur bleue est simplement ce qu'ont en commun tous les objets bleus, le 
cardinal d'un ensemble 
X, noté 
, est ce qu'ont en commun des ensembles qui sont en bijection. En d'autres termes, on dit que 
X et 
Y ont même cardinal si et seulement si  il existe une bijection de 
X dans 
Y. On peut comparer les cardinaux: on dit que le cardinal de 
X est 
inférieur ou égal à celui de 
Y, et on note 
 si et seulement si  il existe une injection de 
X dans 
Y. Grâce au théorème de Cantor-Bernstein, on a la
Proposition
Si 
X et 
Y sont des ensembles,
L'énoncé précédent pourrait paraître évident, sauf que les cardinaux ne sont pas en général des nombres, au sens où on l'entend généralement. Par exemple, un cardinal peut être infini.
Plutôt que d'utiliser les injections pour comparer les ensembles, on aurait pu utiliser les surjections. En fait on a la
Proposition
Soient 
X et 
Y deux ensembles. Les deux propriétés suivantes sont équivalentes
-   Il existe une injection 
f de 
X dans 
Y.
 
-   
X est vide ou il existe une surjection 
g de 
Y sur 
X
 
   
Si 
X n'est pas vide, choisissons un élément 
a de 
X. Si 
f existe, on définit 
g par
Si 
g existe, on définit 
f en choisissant pour 
f(
x) n'importe quel élément de 
.
  
I-4 Ensembles finis
Un ensemble 
E est dit 
fini s'il existe une bijection de 
E sur un intervalle entier 
. S'il n'est pas fini, il est dit 
infini. On va voir que 
n est alors unique.
Théorème
Soient 
n et 
p deux entiers naturels.
-  [i)] Il existe une injection de 
 dans 
 si et seulement si 
.
 
-  [ii)] Il existe une surjection de 
 sur 
 si et seulement si 
 ou 
n=p=0.
 
-  [iii)] Il existe une bijection de 
 sur 
 si et seulement si 
n=p.
 
En particulier, si 
X est un ensemble fini, il existe un entier naturel 
n et un seul tel que 
X est en bijection avec 
. Au lieu de noter 
, on notera 
 et on dira que le cardinal de 
X est 
n.
  
  Démonstration
   
Démontrons la propriété i) par récurrence sur 
n et indépendamment de 
p, c'est-à-dire  appelons 
P(
n) la propriété de 
n qui dit que cette assertion est vraie pour tout 
p.
Comme 
, il y a toujours une injection de 
 dans 
 et 
 est toujours vrai.
Donc 
P(0) est vrai. Supposons 
P(
n) et considérons une injection 
f de 
 dans 
. Supposons d'abord 
f(
n+1)=
p. On a forcément 
p>0. Puisque 
f est injectif, l'image de 
 par 
f est inclus dans 
.
La restriction de 
f à 
, c'est-à-dire  l'application de 
 dans 
 qui coïncide avec 
f est une injection, et l'hypothèse de récurrence implique 
 et 
.
Dans le cas où 
a=
f(
n+1)<
p, il existe une bijection 

 de 
 dans lui-même qui échange 
a et 
p et laisse fixes tous les autres éléments. La composée 
 est encore une injection de 
 dans 
, et vérifie 
g(
n+1)=
p. On a donc encore 
 et P(n+1) est vrai, ce qui achève de démontrer le i). Mais le ii) est exactement équivalent à i) en échangeant 
n et 
p. Enfin i) et ii) donnent iii).
Le théorème précédent justifie la notation 

 employée en deux sens différents, l'un pour les entiers, l'autres pour les cardinaux. Ces deux acceptions sont compatibles. On peut reformuler le théorème précédent de plusieurs manières.
Théorème [principe des tiroirs]
Si 
 est une application et 
X et 
Y sont des ensembles (finis) tels que 
, alors 
f n'est pas injective.
Si on a plus d'objets que de tiroirs, quel que soit le rangement on est obligé de ranger deux objets dans le même tiroir.
Théorème [principe d'inclusion]
Si 
E est un ensemble fini et 
F une partie de 
E, alors 
F est fini et 
. Si, de plus, on a 
, alors 
E=F.
  
  
I-5 Cardinaux infinis
Proposition
Pour tout ensemble infini 
E, il existe une injection de 
 dans 
E.
On dit que 
E est 
dénombrable s'il a même cardinal que 
. C'est le plus petit infini possible:
Certains ensembles classiques sont dénombrables, comme 
, 
, l'ensemble 
 des nombres rationnels,
ou l'ensemble des parties finies de 
.
Mais il existe des cardinaux infinis plus grands. Par exemple, l'ensemble 
 des nombres réels n'est pas dénombrable.
Il est facile de montrer qu'il y a une infinité de cardinaux infinis distincts à l'aide du théorème suivant.
Théorème
Soit 
X un ensemble. Il n'y a pas d'application surjective (donc pas de bijection) de 
X dans l'ensemble 
 des parties de 
X.
  
  Démonstration
   
Soit 

 une application de 
X dans 
. Posons
Supposons qu'il existe 
 tel que 
. On peut donc écrire
ce qui est une contradiction. On a donc prouvé que 
A n'appartient pas à l'image de 

, et 

 n'est pas surjective.
  
I-6 Relations binaires
Une 
relation binaire 
R sur un ensemble 
S est un 
prédicat sur 
, c'est-à-dire  une propriété que possède ou ne possède pas chaque couple 
(
s,
t) d'éléments de 
S. S'il possède la propriété, on dit que 
s est en relation avec 
t et on note 
s R t. La relation 
R est 
réflexive si et seulement si 
La relation 
inverse ou 
opposée à 
R est la relation 
 telle que
La relation 
R est 
symétrique si et seulement si 
c'est-à-dire  
. Elle est 
antisymétrique si et seulement si 
La 
clôture symétrique de la relation 
R est la relation 
 définie par
Elle est évidemment symétrique.
La relation 
R est 
transitive si et seulement si 
La 
clôture réflexive-transitive de la relation 
R est la relation 
 définie par
c'est-à-dire  que l'on peut passer de 
s à 
t en un nombre fini d'étapes, chaque élément étant en relation avec le suivant le long du chemin. La relation 
 est bien sûr réflexive et transitive.
La relation 
R est une 
relation d'ordre si et seulement si  elle est réflexive, antisymétrique et transitive. C'est une 
relation d'équivalence
si elle est réflexive, symétrique et transitive.
Si 
 est une application, la relation définie par
est une relation d'équivalence. En fait, toute relation d'équivalence est obtenue de cette manière. Si 
R est une relation d'équivalence sur 
S, on associe à chaque
s sa 
classe d'équivalence 
 qui est une partie non vide de 
S. L'ensemble des classes d'équivalence, noté 
 est une  
partition de 
S, c'est-à-dire  une famille 
 de parties non vides de 
S, disjointes deux à deux et dont la réunion est 
S. L'application 
 redonne 
R par le procédé décrit au début de ce paragraphe.
  
  
II Outils de base
On a vu qu'une des propriétés les plus fondamentales d'un ensemble fini est son cardinal, un entier naturel. L'objet général de la combinatoire énumérative est de ``calculer'' ce cardinal pour des ensembles particuliers. La plupart du temps, l'ensemble considéré dépend d'un ou plusieurs paramètres, et il s'agit d'exprimer ce cardinal comme fonction de ces paramètres. Nous serons ainsi amenés à définir certaines fonctions de 
 ou 
 dans 
, en commençant avec les opérations de base définies plus haut.
Un autre but naturel de cet étude est de montrer que certains ensembles finis ont même cardinal. Une méthode pour prouver que 
 est de calculer 
 et 
 séparément, puis de comparer les résultats. C'est ce que l'on appelle une preuve par le calcul, ou 
calculatoire. Il est aussi souvent possible de construire explicitement une bijection entre 
A et 
B. On a dans ce cas une preuve combinatoire. De manière générale les mathématiciens préfèrent les preuves combinatoires pour deux raisons en fait liées: elles donnent en général une idée de ``la raison pour laquelle'' 
 alors que les preuves calculatoires suggèrent rarement des idées nouvelles, et elles sont souvent plus satisfaisantes d'un point de vue esthétique.
    II-1 Les opérations de base sur les cardinaux
    II-2 Fonctions caractéristiques
    II-3 Sommes et produits dans un anneau commutatif
    II-4 La formule du binôme
    II-5 Arrangements, permutations et combinaisons
    II-6 Les coefficients multinomiaux
    II-7 La formule du crible
    II-8 Surjections
  
  
II-1 Les opérations de base sur les cardinaux
Théorème [Union disjointe]
Si 
A et 
B sont deux ensembles finis disjoints, l'ensemble 
 est fini et l'on a
   
Par récurrence sur 
. Si 
b=0, 
B est vide et 
 a bien pour cardinal 
.
Si 
, il existe une bijection 
f de 
 dans 
B. Posons 
c=f(b+1). La restriction de 
f à 
 est une bijection de 
 sur 
. On en déduit que 
, et, par hypothèse de récurrence, 
. Il y a donc une bijection 
g de 
 dans 
. On pose 
 et on vérifie que 
g devient une bijection de 
 sur 
, ce qui achève la récurrence.
Théorème [Produit]
Si 
A et 
B sont des ensembles finis, leur produit cartésien 
 est fini, et l'on a
   
Par récurrence sur 
. Si 
b=0, 
B est vide et 
 aussi. On a donc bien 
Si 
, on reprend les notations de la démonstration précédente. Comme 
 est réunion disjointe de 
 et de 
. Ce dernier ensemble est en bijection avec 
A par l'application 
 qui à 
 fait correspondre le couple 
(a,c). Il est donc de cardinal 
 et en appliquant le théorème précédent on a
, ce qui achève la démonstration.
Corollaire [Principe des bergers]
Soit 
B un ensemble fini, 
 une application et 
n un entier naturel non nul. On suppose que
 Alors 
A est fini et 
.
   
Pour chaque 
b dans 
B, numérotons de 1 à  
n les éléments de 
. L'application qui à 
(i,b) fait correspondre le 
i-ème élément de 
 est alors une bijection de 
 sur 
A.
Ce principe est souvent appliqué pour calculer le cardinal de 
B. Ë chaque élément d'un ensemble 
A de pattes, on fait correspondre le mouton du troupeau 
B auquel elle est attachée. Comme chaque mouton a (en principe) 4 pattes, on peut en déduire qu'il y a 4 fois plus de pattes que de moutons, ou 4 fois moins de moutons que de pattes. Cela peut être pratique si l'on voit les pattes mais pas les moutons.
Théorème [Ensemble puissance]
Si 
A et 
B sont des ensembles finis, alors l'ensemble 
AB des applications de 
B dans 
A est fini et l'on a
   
Par récurrence sur 
. Si 
b=0, 
B est vide et il existe exactement une application de 
B dans 
A: à chaque élément de 
 est associé un élément de 
A et ceci ne peut être fait que d'une seule façon. On a donc bien
.
Si 
, on reprend les notations de la démonstration précédente.
Ë chaque application 
F de 
B dans 
A, faisons correspondre le couple 
, où 
G est la restriction de 
F à 
B' et 
a=
F(
c). L'application 

  est une bijection de 
AB sur 
. En appliquant successivement le théorème précédent, l'hypothèse de récurrence et la définition de l'exponentiation, on trouve bien
ce qui achève la démonstration.
  
II-2 Fonctions caractéristiques
Soit 
X un ensemble et 
A une partie de 
X. On appelle 
fonction caractéristique de 
A et on note 
la fonction de 
X dans l'ensemble 
 définie par
Il est clair que l'application qui à 
A fait correspondre 
 est une bijection de 
 sur 
, la réciproque étant l'application qui à 
f fait correspondre 
.
On en déduit aussitôt la
Proposition
Si 
, alors 
.
Les opérations d'intersection, de passage au complémentaire et de réunion se traduisent naturellement en termes de fonctions caractéristiques:
Proposition
Nous verrons plus loin une généralisation de cette dernière formule.
 Le cardinal d'une partie finie peut s'écrire en termes de fonctions caractéristiques:
Proposition
Pour toute partie 
A d'un ensemble (fini) 
X, on a
  
II-3 Sommes et produits dans un anneau commutatif
Soit 
A un anneau commutatif, c'est-à-dire  un ensemble muni de deux lois de composition interne notées 
 et 
 (ou sans aucun signe) qui sont associatives et commutatives, admettant chacune un élément neutre noté respectivement 0 et 1, et dans lequel on a l'existence d'un 
opposé et la relation de 
distributivité. En d'autres termes, pour tout 
a, 
b et 
c dans 
A, on a
-   
a+ b= b + a,
 
-   
(a+b)+c = a+(b+c),
 
-   
0+a = a,
 
-   
,
 
-   
a b = b a,
 
-   
(a b) c = a(b c),
 
-   
1.0a = a,
 
-   
a(b+c) = a b + a c.
 
Dans un anneau commutatif, on peut définir la somme ainsi que le produit d'une famille finie d'éléments: une somme vide vaut 0 et un produit vide vaut 1, puis, par récurrence, on définit
et
Comme les opérations sont commutatives, on ne se préoccupe pas de l'ordre des opérandes et on peut écrire simplement 
 ou 
 dès lors que l'ensemble d'indices 
I est fini.
On peut dans ce cadre ``développer un produit'':
Proposition [Formule du produit]
Soient 
 et 
 deux familles finies d'éléments d'un anneau commutatif 
A. On a
la somme étant indexée par les parties de 
I de 
.
L'idée de cette proposition est que si l'on utilise autant de fois que possible la relation de distributivité pour développer le produit, on se retrouve avec une somme de termes. Chacun de ces termes est produit de 
n facteurs, un facteur provenant de chacune des sommes 
(
ai+
bi) et valant donc soit 
ai soit 
bi. En notant 
I l'ensemble des indices pour lesquels on a choisi 
ai plutôt que 
bi, on voit que chaque terme correspond a une partie 
I de 
 et une seule, et que le terme correspondant à 
I est bien
.
La preuve suivante est là seulement pour respecter le règlement...
  
  Démonstration
   
Par récurrence sur 
n. Pour 
n=0, il suffit de voir que 
 est l'unique partie de 

. La somme de droite a donc exactement un terme, qui est un produit vide comme la partie gauche de l'équation. On est donc ramené à 
1=1 qui est vrai.
En supposant la relation vraie pour 
n, on a
 
ce qui constitue la relation pour 
n+1 et achève la preuve par récurrence. Le passage de la quatrième ligne à la cinquième se fait en posant 
  dans la première somme et 
J=
I  dans la seconde.
  
II-4 La formule du binôme
Un cas particulier important de la formule du produit est celui où tous les 
ai sont égaux entre eux et tous les 
bi de même. la formule devient
c'est-à-dire  que le terme correspondant à 
 ne dépend que du cardinal 
 qui est un entier 
k compris entre 
0 et 
n. Il est alors naturel de regrouper entre eux les termes correspondant à la même valeur de 
k. Cela amène à définir
les 
coefficients binômiaux. Pour tout couple d'entiers naturels 
n et 
k, on note 
 et on prononce ``
k parmi 
n'' le nombre de parties à 
k éléments dans un ensemble à 
n éléments. On a donc la
Proposition [formule du binôme]
Il est utile de pouvoir calculer ces coefficients. Pour 
n=0, il s'agit de compter les parties de l'ensemble vide. Il y en a une seule, et son cardinal est 0. On a donc
De façon générale, il est clair que 
 est nul sauf si 
.
On peut donc convenir que 
 pour 
k<0. On a alors la
Proposition
  
  Démonstration
   
Posons
 
 
L'application 
 est une bijection de 
B' sur 
B. Les ensembles 
C et 
C' coïncident, et
A est réunion disjointe de 
B et 
C. On a donc
 et les coefficients du binôme peuvent se calculer par récurrence.
En pratique, la méthode ci-dessus est celle qui est employée pour calculer les coefficients du binôme et construire ce qu'on appelle le 
triangle de Pascal, c'est-à-dire  une table de ces coefficients, généralement arrangée comme ci-dessous.
chaque terme étant somme de celui qui est immédiatement au dessus et de celui qui est à gauche de celui-là. Les cases vides contiennent la valeur 0.
  
  
II-5 Arrangements, permutations et combinaisons
La factorielle d'un entier 
n est définie (par récurrence) par la formule
On peut exprimer à l'aide de factorielles le nombre 
A(
n,
k) de 
k-
arrangements ou injections de 
 dans 
:
Proposition
  
  Démonstration
   
La deuxième égalité étant évidente, prouvons la première par récurrence sur 
k. Il y a une seule injection de l'ensemble vide dans 
 et le produit vide
vaut 1. L'égalité est donc vraie pour 
k=0. Supposons la relation vraie pour 
k. Ë chaque injection 
f de 
 dans 
 on fait correspondre 
, sa restriction à 
 qui est une injection de 
 dans 
. L'image réciproque 
 est formée des 
f qui ont même valeur que 
g sur 
. Il y en a autant que de valeurs possibles pour 
f(
k+1), c'est-à-dire  n'importe quel élément de 
 différent des 
k valeurs prises par 
g. Il y a donc 
 éléments dans 
. On déduit donc du principe des bergers que
d'où le résultat.
Le cas particulier 
k=
n mérite d'être considéré à part. On appelle 
permutation d'un ensemble 
X une bijection de 
X dans lui-même.
Pour tout entier naturel 
n, on note 
 l'ensemble des permutations de 
:
Corollaire
On peut maintenant compter le nombre de 
k-
combinaisons, c'est-à-dire  de parties de cardinal 
k, de 
:
Proposition
  
  Démonstration
   
Nous allons donner deux preuves distinctes de cette importante relation. La première est une application du principe des bergers. Ë chaque injection 
f
de 
 dans 
, faisons correspondre son image 
. C'est une partie de 
 de cardinal 
k. Si 
A est une partie de 
de cardinal 
k, il existe une bijection 
f de 
 sur 
A. L'ensemble 
 est formé des 
, où 

 parcourt 
.
On a donc
et le principe des bergers donne
d'où la proposition.
L'autre démonstration est par récurrence sur 
n. Le cas 
n=0 est immédiat.
Un calcul simple donne
 
 
pour 
. Il reste les cas 
k=0 et 
k=
n+1 pour lesquels les deux membres valent 1.
  
II-6 Les coefficients multinomiaux
Il est facile de généraliser la formule du binôme au cas d'un trinôme, etc.
Pour chaque 
r-uplet d'entiers naturels 
 de somme 
n, on définit le 
coefficient multinomial
 comme le nombre de 
r-uplets 
 de parties disjointes de 
 telles que 
.
Proposition
Soit 
 un 
r-uplet d'éléments d'un anneau commutatif et 
n un entier naturel. On a
On a pour ces coefficients une formule analogue à celle des coefficients binomiaux
et dans le cas 
r=2, on retrouve les coefficients du binôme
Proposition
  
  
II-7 La formule du crible
Il est relativement simple de prouver que, si 
A et 
B sont des parties finies d'un ensemble 
E, leur réunion
est finie et l'on a
et de même
Dans le cas général, on a la 
formule du crible.
Théorème [Formule du crible]
Si 
 est une famille de 
n parties d'un ensemble fini 
E, leur réunion a pour cardinal
 
Ce théorème est aussi appelé 
principe d'inclusion-exclusion.
  
  Démonstration
   
Dans l'anneau 
 des fonctions de 
E dans 
, posons 
 et 
bi=1, de façon que 
, et appliquons la formule du produit:
 
 
En effet, le terme correspondant à 
 vaut 1. On élimine ce terme et on change de signe pour obtenir
Il reste à calculer la somme des valeurs de ces deux fonctions
  
II-8 Surjections
Grâce à la formule du crible, on peut compter le nombre 
S(
n,
k) de surjections de 
 dans 
.
Notons 
 l'ensemble des applications de 
 dans 
. On a vu que 
. Pour tout 
, notons
l'ensemble des applications de 
 dans 
. La réunion des 
Ai est l'ensemble des applications de 
 dans 
 qui ne sont pas surjectives.
Il y en a donc 
kn-
S(
n,
k). Pour tout 
, on a
et 
 ne dépend que du cardinal 
. La formule du crible donne donc
On a donc montré la
Proposition
Explicitons le cas 
k=4. On a
et on vérifie bien que 
S(
n,4)=0 pour 
n<4 et 
S(4,4)=24=4! puisqu'une surjection de
 dans lui-même est automatiquement une bijection.