Combinatoire énumérative
Combinatoire énumérative
I Rappels de théorie des ensembles
II Outils de base
I Rappels de théorie des ensembles
Le point de vue adopté est informel. On suppose connue une partie du vocabulaire de base sur les ensembles: appartenance, inclusion, produit cartésien, ensemble des parties.
I-1 Applications
I-2 Entiers naturels, récurrence
I-3 Le cardinal d'un ensemble
I-4 Ensembles finis
I-5 Cardinaux infinis
I-6 Relations binaires
I-1 Applications
Une
application (ou
fonction)
f d'un ensemble
E dans un ensemble
F, notée
, est la donnée, pour chaque élément
x de
E d'un élément
f(
x) de
F. L'ensemble
E est appelé
ensemble de départ et l'ensemble
F est l'
ensemble d'arrivée. L'élément
f(
x) est l'
image de
x par
f. On écrit aussi
.
Un exemple trivial d'application est l'
application identique de
E, notée
telle que
. Si
et
sont deux applications, l'
application composée de
f et
g est
Si
A est une partie de
E, on note
f(
A) et on nomme
image de
A par
f la partie
de
F formée des images dans
F des éléments de
A. De même, si
B est une partie de
F, on note
et on nomme
image réciproque de
B par
f la partie
de
E formée des éléments de
E dont l'image est dans
B. Par extension, si
y est un élément de
F, on note
l'image réciproque du singleton
. C'est donc l'ensemble des éléments de
E dont l'image par
f est
y.
Cet ensemble peut être vide. On dit que l'application
f est
surjective, ou que c'est une
surjection si elle n'est vide pour aucune valeur de
y et qu'elle est
injective, ou que c'est une
injection s'il n'a plus d'un élément pour aucune valeur de
y:
Définition
Une application
est
-
injective si et seulement si
-
surjective si et seulement si
-
bijective si et seulement si elle est à la fois injective et surjective.
En résumé,
f est bijective si et seulement si pour tout
y de
F, l'ensemble
a un élément et un seul, que l'on note
encore
. On voit facilement que
est alors une bijection de
F dans
E et que l'on a
et
. On dit que
est la bijection réciproque de
f.
Il existe une autre notation courante pour les applications. La notation
désigne une
famille d'éléments de
X indexée par l'ensemble
I. Il s'agit simplement d'une application de
I dans
X, où
xi est l'image de
i par l'application.
I-2 Entiers naturels, récurrence
Nous admettrons l'existence d'un ensemble
dit ensemble des
entiers naturels
muni d'une application injective
qui à un entier
n fait correspondre son
successeur noté
n+1 qui
est telle que tout entier autre que 0 a un (unique)
prédécesseur et qui vérifie le
principe de récurrence:
Ce principe est en général utilisé de la façon suivante. Soit
P un
prédicat sur
, c'est-à-dire une propriété qui, pour chaque entier naturel, peut être vraie ou fausse. Si on a établi que
P(0) est vrai et si pour
n quelconque, en supposant
P(
n) on a prouvé
P(
n+1), alors
P(
n) est vrai pour tout
n. On applique pour cela l'énoncé ci-dessus à la partie
A de
formée des
n tels que
P(
n) est vrai.
On peut déduire de ce principe la
Proposition [construction par récurrence]
Si
est une application et
x un élément de
X, il existe une application
et une seule telle que
g(0)=x et
.
Une famille indexée par les entiers naturels s'appelle une
suite.
L'application
g ci-dessus est souvent notée sous forme de suite. On pose
xn=
g(
n) et on dit que la suite
est
définie par récurrence par les relations
x0=
x et
.
L'ensemble
est alors muni de trois
lois de composition c'est-à-dire d'applications de
dans
appelées
addition,
multiplication et
exponentiation et notées respectivement
,
ou
a b et
.
La construction se fait en utilisant le principe de récurrence et les relations
En d'autres termes, l'addition est définie par récurrence à partir de l'application
S, la multiplication par récurrence à partir de l'addition et l'exponentiation par récurrence à partir de la multiplication.
Retenons en particulier que
0
0=1.
Si
m et
n sont deux entiers naturels, on dit que
m est
inférieur ou égal à
n et on note
s'il existe
tel que
m+
p=
n. On montre que c'est une
relation d'ordre c'est-à-dire que l'on a
La relation d'ordre sur
est un
bon ordre, c'est-à-dire que l'on a:
Proposition
Toute partie non vide de
a un plus petit élément.
Démonstration
Soit
X une partie de
dont on suppose qu'elle n'a pas de plus petit élément. On pose
l'ensemble des minorants stricts de
X. Comme
0 est le plus petit élément de
, il ne peut appartenir à
X et on a
. D'autre part, si
on a
n<
m pour tout
m dans
X. Cela implique
mais
n+1=
m impliquerait que
n+1 est le plus petit élément de
X. On a donc
n+1<
m et
. En application du principe de récurrence, on a
, donc
, ce qui termine la preuve.
Si
m et
n sont deux entiers naturels, on notera
En particulier, lorsque
m>
n,
est l'ensemble vide
.
I-3 Le cardinal d'un ensemble
L'existence d'une injection de
E dans
F peut être interprétée comme ``
E est plus petit que
F''. Le résultat suivant permet de donner un sens précis à cette intuition.
Théorème [de Cantor-Bernstein]
Soient
E et
F deux ensembles. S'il existe une injection de
E dans
F et une injection de
F dans
E, alors il existe une bijection de
E dans
F.
Démonstration
On définit par récurrence deux suites de parties de
E par
A0=
E,
A'0=
g(
F),
et
. On voit par récurrence que ces parties sont ``emboîtées'':
On pose
et on définit une application
par
tel que
}
f(x)&{ sinon}
{array} .
)
Il reste à vérifier que
est une bijection.
De même que la couleur bleue est simplement ce qu'ont en commun tous les objets bleus, le
cardinal d'un ensemble
X, noté
, est ce qu'ont en commun des ensembles qui sont en bijection. En d'autres termes, on dit que
X et
Y ont même cardinal si et seulement si il existe une bijection de
X dans
Y. On peut comparer les cardinaux: on dit que le cardinal de
X est
inférieur ou égal à celui de
Y, et on note
si et seulement si il existe une injection de
X dans
Y. Grâce au théorème de Cantor-Bernstein, on a la
Proposition
Si
X et
Y sont des ensembles,
L'énoncé précédent pourrait paraître évident, sauf que les cardinaux ne sont pas en général des nombres, au sens où on l'entend généralement. Par exemple, un cardinal peut être infini.
Plutôt que d'utiliser les injections pour comparer les ensembles, on aurait pu utiliser les surjections. En fait on a la
Proposition
Soient
X et
Y deux ensembles. Les deux propriétés suivantes sont équivalentes
- Il existe une injection
f de
X dans
Y.
-
X est vide ou il existe une surjection
g de
Y sur
X
Démonstration
Si
X n'est pas vide, choisissons un élément
a de
X. Si
f existe, on définit
g par
Si
g existe, on définit
f en choisissant pour
f(
x) n'importe quel élément de
.
I-4 Ensembles finis
Un ensemble
E est dit
fini s'il existe une bijection de
E sur un intervalle entier
. S'il n'est pas fini, il est dit
infini. On va voir que
n est alors unique.
Théorème
Soient
n et
p deux entiers naturels.
- [i)] Il existe une injection de
dans
si et seulement si
.
- [ii)] Il existe une surjection de
sur
si et seulement si
ou
n=p=0.
- [iii)] Il existe une bijection de
sur
si et seulement si
n=p.
En particulier, si
X est un ensemble fini, il existe un entier naturel
n et un seul tel que
X est en bijection avec
. Au lieu de noter
, on notera
et on dira que le cardinal de
X est
n.
Démonstration
Démontrons la propriété i) par récurrence sur
n et indépendamment de
p, c'est-à-dire appelons
P(
n) la propriété de
n qui dit que cette assertion est vraie pour tout
p.
Comme
, il y a toujours une injection de
dans
et
est toujours vrai.
Donc
P(0) est vrai. Supposons
P(
n) et considérons une injection
f de
dans
. Supposons d'abord
f(
n+1)=
p. On a forcément
p>0. Puisque
f est injectif, l'image de
par
f est inclus dans
.
La restriction de
f à
, c'est-à-dire l'application de
dans
qui coïncide avec
f est une injection, et l'hypothèse de récurrence implique
et
.
Dans le cas où
a=
f(
n+1)<
p, il existe une bijection
de
dans lui-même qui échange
a et
p et laisse fixes tous les autres éléments. La composée
est encore une injection de
dans
, et vérifie
g(
n+1)=
p. On a donc encore
et P(n+1) est vrai, ce qui achève de démontrer le i). Mais le ii) est exactement équivalent à i) en échangeant
n et
p. Enfin i) et ii) donnent iii).
Le théorème précédent justifie la notation
employée en deux sens différents, l'un pour les entiers, l'autres pour les cardinaux. Ces deux acceptions sont compatibles. On peut reformuler le théorème précédent de plusieurs manières.
Théorème [principe des tiroirs]
Si
est une application et
X et
Y sont des ensembles (finis) tels que
, alors
f n'est pas injective.
Si on a plus d'objets que de tiroirs, quel que soit le rangement on est obligé de ranger deux objets dans le même tiroir.
Théorème [principe d'inclusion]
Si
E est un ensemble fini et
F une partie de
E, alors
F est fini et
. Si, de plus, on a
, alors
E=F.
I-5 Cardinaux infinis
Proposition
Pour tout ensemble infini
E, il existe une injection de
dans
E.
On dit que
E est
dénombrable s'il a même cardinal que
. C'est le plus petit infini possible:
Certains ensembles classiques sont dénombrables, comme
,
, l'ensemble
des nombres rationnels,
ou l'ensemble des parties finies de
.
Mais il existe des cardinaux infinis plus grands. Par exemple, l'ensemble
des nombres réels n'est pas dénombrable.
Il est facile de montrer qu'il y a une infinité de cardinaux infinis distincts à l'aide du théorème suivant.
Théorème
Soit
X un ensemble. Il n'y a pas d'application surjective (donc pas de bijection) de
X dans l'ensemble
des parties de
X.
Démonstration
Soit
une application de
X dans
. Posons
Supposons qu'il existe
tel que
. On peut donc écrire
ce qui est une contradiction. On a donc prouvé que
A n'appartient pas à l'image de
, et
n'est pas surjective.
I-6 Relations binaires
Une
relation binaire
R sur un ensemble
S est un
prédicat sur
, c'est-à-dire une propriété que possède ou ne possède pas chaque couple
(
s,
t) d'éléments de
S. S'il possède la propriété, on dit que
s est en relation avec
t et on note
s R t. La relation
R est
réflexive si et seulement si
La relation
inverse ou
opposée à
R est la relation
telle que
La relation
R est
symétrique si et seulement si
c'est-à-dire
. Elle est
antisymétrique si et seulement si
La
clôture symétrique de la relation
R est la relation
définie par
Elle est évidemment symétrique.
La relation
R est
transitive si et seulement si
La
clôture réflexive-transitive de la relation
R est la relation
définie par
c'est-à-dire que l'on peut passer de
s à
t en un nombre fini d'étapes, chaque élément étant en relation avec le suivant le long du chemin. La relation
est bien sûr réflexive et transitive.
La relation
R est une
relation d'ordre si et seulement si elle est réflexive, antisymétrique et transitive. C'est une
relation d'équivalence
si elle est réflexive, symétrique et transitive.
Si
est une application, la relation définie par
est une relation d'équivalence. En fait, toute relation d'équivalence est obtenue de cette manière. Si
R est une relation d'équivalence sur
S, on associe à chaque
s sa
classe d'équivalence
qui est une partie non vide de
S. L'ensemble des classes d'équivalence, noté
est une
partition de
S, c'est-à-dire une famille
de parties non vides de
S, disjointes deux à deux et dont la réunion est
S. L'application
redonne
R par le procédé décrit au début de ce paragraphe.
II Outils de base
On a vu qu'une des propriétés les plus fondamentales d'un ensemble fini est son cardinal, un entier naturel. L'objet général de la combinatoire énumérative est de ``calculer'' ce cardinal pour des ensembles particuliers. La plupart du temps, l'ensemble considéré dépend d'un ou plusieurs paramètres, et il s'agit d'exprimer ce cardinal comme fonction de ces paramètres. Nous serons ainsi amenés à définir certaines fonctions de
ou
dans
, en commençant avec les opérations de base définies plus haut.
Un autre but naturel de cet étude est de montrer que certains ensembles finis ont même cardinal. Une méthode pour prouver que
est de calculer
et
séparément, puis de comparer les résultats. C'est ce que l'on appelle une preuve par le calcul, ou
calculatoire. Il est aussi souvent possible de construire explicitement une bijection entre
A et
B. On a dans ce cas une preuve combinatoire. De manière générale les mathématiciens préfèrent les preuves combinatoires pour deux raisons en fait liées: elles donnent en général une idée de ``la raison pour laquelle''
alors que les preuves calculatoires suggèrent rarement des idées nouvelles, et elles sont souvent plus satisfaisantes d'un point de vue esthétique.
II-1 Les opérations de base sur les cardinaux
II-2 Fonctions caractéristiques
II-3 Sommes et produits dans un anneau commutatif
II-4 La formule du binôme
II-5 Arrangements, permutations et combinaisons
II-6 Les coefficients multinomiaux
II-7 La formule du crible
II-8 Surjections
II-1 Les opérations de base sur les cardinaux
Théorème [Union disjointe]
Si
A et
B sont deux ensembles finis disjoints, l'ensemble
est fini et l'on a
Démonstration
Par récurrence sur
. Si
b=0,
B est vide et
a bien pour cardinal
.
Si
, il existe une bijection
f de
dans
B. Posons
c=f(b+1). La restriction de
f à
est une bijection de
sur
. On en déduit que
, et, par hypothèse de récurrence,
. Il y a donc une bijection
g de
dans
. On pose
et on vérifie que
g devient une bijection de
sur
, ce qui achève la récurrence.
Théorème [Produit]
Si
A et
B sont des ensembles finis, leur produit cartésien
est fini, et l'on a
Démonstration
Par récurrence sur
. Si
b=0,
B est vide et
aussi. On a donc bien
Si
, on reprend les notations de la démonstration précédente. Comme
est réunion disjointe de
et de
. Ce dernier ensemble est en bijection avec
A par l'application
qui à
fait correspondre le couple
(a,c). Il est donc de cardinal
et en appliquant le théorème précédent on a
, ce qui achève la démonstration.
Corollaire [Principe des bergers]
Soit
B un ensemble fini,
une application et
n un entier naturel non nul. On suppose que
Alors
A est fini et
.
Démonstration
Pour chaque
b dans
B, numérotons de 1 à
n les éléments de
. L'application qui à
(i,b) fait correspondre le
i-ème élément de
est alors une bijection de
sur
A.
Ce principe est souvent appliqué pour calculer le cardinal de
B. Ë chaque élément d'un ensemble
A de pattes, on fait correspondre le mouton du troupeau
B auquel elle est attachée. Comme chaque mouton a (en principe) 4 pattes, on peut en déduire qu'il y a 4 fois plus de pattes que de moutons, ou 4 fois moins de moutons que de pattes. Cela peut être pratique si l'on voit les pattes mais pas les moutons.
Théorème [Ensemble puissance]
Si
A et
B sont des ensembles finis, alors l'ensemble
AB des applications de
B dans
A est fini et l'on a
Démonstration
Par récurrence sur
. Si
b=0,
B est vide et il existe exactement une application de
B dans
A: à chaque élément de
est associé un élément de
A et ceci ne peut être fait que d'une seule façon. On a donc bien
.
Si
, on reprend les notations de la démonstration précédente.
Ë chaque application
F de
B dans
A, faisons correspondre le couple
, où
G est la restriction de
F à
B' et
a=
F(
c). L'application
est une bijection de
AB sur
. En appliquant successivement le théorème précédent, l'hypothèse de récurrence et la définition de l'exponentiation, on trouve bien
ce qui achève la démonstration.
II-2 Fonctions caractéristiques
Soit
X un ensemble et
A une partie de
X. On appelle
fonction caractéristique de
A et on note
la fonction de
X dans l'ensemble
définie par
Il est clair que l'application qui à
A fait correspondre
est une bijection de
sur
, la réciproque étant l'application qui à
f fait correspondre
.
On en déduit aussitôt la
Proposition
Si
, alors
.
Les opérations d'intersection, de passage au complémentaire et de réunion se traduisent naturellement en termes de fonctions caractéristiques:
Proposition
Nous verrons plus loin une généralisation de cette dernière formule.
Le cardinal d'une partie finie peut s'écrire en termes de fonctions caractéristiques:
Proposition
Pour toute partie
A d'un ensemble (fini)
X, on a
II-3 Sommes et produits dans un anneau commutatif
Soit
A un anneau commutatif, c'est-à-dire un ensemble muni de deux lois de composition interne notées
et
(ou sans aucun signe) qui sont associatives et commutatives, admettant chacune un élément neutre noté respectivement 0 et 1, et dans lequel on a l'existence d'un
opposé et la relation de
distributivité. En d'autres termes, pour tout
a,
b et
c dans
A, on a
-
a+ b= b + a,
-
(a+b)+c = a+(b+c),
-
0+a = a,
-
,
-
a b = b a,
-
(a b) c = a(b c),
-
1.0a = a,
-
a(b+c) = a b + a c.
Dans un anneau commutatif, on peut définir la somme ainsi que le produit d'une famille finie d'éléments: une somme vide vaut 0 et un produit vide vaut 1, puis, par récurrence, on définit
et
Comme les opérations sont commutatives, on ne se préoccupe pas de l'ordre des opérandes et on peut écrire simplement
ou
dès lors que l'ensemble d'indices
I est fini.
On peut dans ce cadre ``développer un produit'':
Proposition [Formule du produit]
Soient
et
deux familles finies d'éléments d'un anneau commutatif
A. On a
la somme étant indexée par les parties de
I de
.
L'idée de cette proposition est que si l'on utilise autant de fois que possible la relation de distributivité pour développer le produit, on se retrouve avec une somme de termes. Chacun de ces termes est produit de
n facteurs, un facteur provenant de chacune des sommes
(
ai+
bi) et valant donc soit
ai soit
bi. En notant
I l'ensemble des indices pour lesquels on a choisi
ai plutôt que
bi, on voit que chaque terme correspond a une partie
I de
et une seule, et que le terme correspondant à
I est bien
.
La preuve suivante est là seulement pour respecter le règlement...
Démonstration
Par récurrence sur
n. Pour
n=0, il suffit de voir que
est l'unique partie de
. La somme de droite a donc exactement un terme, qui est un produit vide comme la partie gauche de l'équation. On est donc ramené à
1=1 qui est vrai.
En supposant la relation vraie pour
n, on a
ce qui constitue la relation pour
n+1 et achève la preuve par récurrence. Le passage de la quatrième ligne à la cinquième se fait en posant
dans la première somme et
J=
I dans la seconde.
II-4 La formule du binôme
Un cas particulier important de la formule du produit est celui où tous les
ai sont égaux entre eux et tous les
bi de même. la formule devient
c'est-à-dire que le terme correspondant à
ne dépend que du cardinal
qui est un entier
k compris entre
0 et
n. Il est alors naturel de regrouper entre eux les termes correspondant à la même valeur de
k. Cela amène à définir
les
coefficients binômiaux. Pour tout couple d'entiers naturels
n et
k, on note
et on prononce ``
k parmi
n'' le nombre de parties à
k éléments dans un ensemble à
n éléments. On a donc la
Proposition [formule du binôme]
Il est utile de pouvoir calculer ces coefficients. Pour
n=0, il s'agit de compter les parties de l'ensemble vide. Il y en a une seule, et son cardinal est 0. On a donc
De façon générale, il est clair que
est nul sauf si
.
On peut donc convenir que
pour
k<0. On a alors la
Proposition
Démonstration
Posons
L'application
est une bijection de
B' sur
B. Les ensembles
C et
C' coïncident, et
A est réunion disjointe de
B et
C. On a donc
et les coefficients du binôme peuvent se calculer par récurrence.
En pratique, la méthode ci-dessus est celle qui est employée pour calculer les coefficients du binôme et construire ce qu'on appelle le
triangle de Pascal, c'est-à-dire une table de ces coefficients, généralement arrangée comme ci-dessous.
chaque terme étant somme de celui qui est immédiatement au dessus et de celui qui est à gauche de celui-là. Les cases vides contiennent la valeur 0.
II-5 Arrangements, permutations et combinaisons
La factorielle d'un entier
n est définie (par récurrence) par la formule
On peut exprimer à l'aide de factorielles le nombre
A(
n,
k) de
k-
arrangements ou injections de
dans
:
Proposition
Démonstration
La deuxième égalité étant évidente, prouvons la première par récurrence sur
k. Il y a une seule injection de l'ensemble vide dans
et le produit vide
vaut 1. L'égalité est donc vraie pour
k=0. Supposons la relation vraie pour
k. Ë chaque injection
f de
dans
on fait correspondre
, sa restriction à
qui est une injection de
dans
. L'image réciproque
est formée des
f qui ont même valeur que
g sur
. Il y en a autant que de valeurs possibles pour
f(
k+1), c'est-à-dire n'importe quel élément de
différent des
k valeurs prises par
g. Il y a donc
éléments dans
. On déduit donc du principe des bergers que
d'où le résultat.
Le cas particulier
k=
n mérite d'être considéré à part. On appelle
permutation d'un ensemble
X une bijection de
X dans lui-même.
Pour tout entier naturel
n, on note
l'ensemble des permutations de
:
Corollaire
On peut maintenant compter le nombre de
k-
combinaisons, c'est-à-dire de parties de cardinal
k, de
:
Proposition
Démonstration
Nous allons donner deux preuves distinctes de cette importante relation. La première est une application du principe des bergers. Ë chaque injection
f
de
dans
, faisons correspondre son image
. C'est une partie de
de cardinal
k. Si
A est une partie de
de cardinal
k, il existe une bijection
f de
sur
A. L'ensemble
est formé des
, où
parcourt
.
On a donc
et le principe des bergers donne
d'où la proposition.
L'autre démonstration est par récurrence sur
n. Le cas
n=0 est immédiat.
Un calcul simple donne
pour
. Il reste les cas
k=0 et
k=
n+1 pour lesquels les deux membres valent 1.
II-6 Les coefficients multinomiaux
Il est facile de généraliser la formule du binôme au cas d'un trinôme, etc.
Pour chaque
r-uplet d'entiers naturels
de somme
n, on définit le
coefficient multinomial
comme le nombre de
r-uplets
de parties disjointes de
telles que
.
Proposition
Soit
un
r-uplet d'éléments d'un anneau commutatif et
n un entier naturel. On a
On a pour ces coefficients une formule analogue à celle des coefficients binomiaux
et dans le cas
r=2, on retrouve les coefficients du binôme
Proposition
II-7 La formule du crible
Il est relativement simple de prouver que, si
A et
B sont des parties finies d'un ensemble
E, leur réunion
est finie et l'on a
et de même
Dans le cas général, on a la
formule du crible.
Théorème [Formule du crible]
Si
est une famille de
n parties d'un ensemble fini
E, leur réunion a pour cardinal
Ce théorème est aussi appelé
principe d'inclusion-exclusion.
Démonstration
Dans l'anneau
des fonctions de
E dans
, posons
et
bi=1, de façon que
, et appliquons la formule du produit:
En effet, le terme correspondant à
vaut 1. On élimine ce terme et on change de signe pour obtenir
Il reste à calculer la somme des valeurs de ces deux fonctions
II-8 Surjections
Grâce à la formule du crible, on peut compter le nombre
S(
n,
k) de surjections de
dans
.
Notons
l'ensemble des applications de
dans
. On a vu que
. Pour tout
, notons
l'ensemble des applications de
dans
. La réunion des
Ai est l'ensemble des applications de
dans
qui ne sont pas surjectives.
Il y en a donc
kn-
S(
n,
k). Pour tout
, on a
et
ne dépend que du cardinal
. La formule du crible donne donc
On a donc montré la
Proposition
Explicitons le cas
k=4. On a
et on vérifie bien que
S(
n,4)=0 pour
n<4 et
S(4,4)=24=4! puisqu'une surjection de
dans lui-même est automatiquement une bijection.